Un enfant mort ne pouvait être baptisé. Un enfant non baptisé ne pouvait être enseveli en terre sainte. Or donc, on guettait sur l’enfant le moindre signe de vie : un clignement de paupière, un soupçon de chaleur, un mouvement de pied… tout était bon pour justifier « la vie certaine » et autoriser le baptême.
En désespoir de cause, quand aucun signe de vie n’avait pu être décelé, il arrivait même, dans certaines régions, que l’on recourût au miracle afin de « ressusciter » l’enfant pendant quelques minutes, au cours desquelles on s’empressait de le baptiser. Ainsi, on transportait les petits corps sans vie dans certains lieux magiques (croix, statues, fontaines…), réputés pour accorder ce prodige.
En Anjou, point de miracle ! (Du moins, je n’en n’ai pas encore trouvé…) Mais lorsque la magie est inopérante, la science prend le relais. C’est ainsi que l’enfant de Nicolas TOUPELIN, baptisé à Briollay le 6 décembre 1719, doit son salut, non pas à la grâce d’une magicienne, mais à l’observation d’un « scientifique ».

« Le sixieme jour de decembre mil sept cent dix neuf nous curé sousigné, assistant MARIE MOULINET, femme de Nicolas TOUPLIN, à la mort, la ditte MOULINET estant dédédée, le sieur GORMAND maistre chirurgien demeurant en la paroisse de Tiercé a faict ouverture du corps de la dite MOULINET dans lequel il a trouvé un enfant que j’ay baptisé après avoir demandé à haute voix s’il vivoit, et sur le raport du dit sieur GORMAND et assurence de Philippe BUSSON, veuve Michel PICHON, de Charlotte LAURIOU femme d’Ardouin MAILLARD, de Catherine ANGER veuve Simphorien FOGER et de Marie PAUVERT fille, qui auroient touché le dit enfant et toutes certifié le dit enfant vivant, je l’ay baptisé. La dite Phililippe BUSSON,et la dite ANGER on dit ne sçavoir signer. » –

« Nous soussigné sertifions que l’extret sy desus contient vérité et avoir fait l’ouverture de laditte MOULINET et avoir requis le sieur curé de batisé ledit enfant sur la connoissance sertene de la vie par l’atouchement sur la regions du coeur et avoir distingué part le tact les mouvements de sistolles et dystolles qui marque la vie sertenne. »
Des systoles et des diastoles
Voici ce qu’écrit Pierre DIONIS, médecin et chirurgien à la cour de Louis XIV, dans son ouvrage Anatomie de l’homme suivant la circulation du sang, paru en 1690, à propos des systoles et des diastoles :

Sans doute le sieur GORMAND avait-il eu connaissance de cet ouvrage, qui fut la « bible des chirurgiens » au début du 18ème siècle…
Sources, Notes et Liens
Guitard Eugène-Humbert. Les « signes de vie » pour le baptême des enfants mort-nés : A. Jubin, in Cahiers lyonnais d’histoire de la médecine, 1962, Revue d’histoire de la pharmacie, 1963, vol. 51, n° 178, p. 157. (Lire en ligne)
L’opération Césarienne vue sous l’angle religieux, avant la Révolution, MODES de VIE aux 16e, 17e siècles, (Blog de Mme Odile Halbert).
Illustration – La naissance de César (césarienne) – les faits des Romains, Paris, BnF, Département des Manuscrits occidentaux, NAF 3576, fol.197 – (Voir en ligne).


Encore un très bon article bien documenté !
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Oui bravo! C’est un bon article rédigé d’une manière captivante.
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Un document rare et sa très belle illustration !
Merci.
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Toujours autant de talent à nous dénicher des actes extraordinaires, bravo !
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Mille mercis à tous pour vos commentaires qui m’encouragent à poursuivre…
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